La Mongolie. À cheval.

Une excursion inoubliable au pays du ciel bleu.

 

Texte et photos Marie-Eve Gauthier



Des fois, tu as envie de t’évader. Pour vrai. De t’immerger dans une autre culture, un autre pays. Tu fais ça pour te déraciner et aussi pour te voir autrement, ailleurs.

Être toi, à 1000%.

C’est dans cet état d’esprit que ma sœur Catherine et moi sommes parties en Mongolie. À cheval. Un rêve de petites filles qui ont grandi sur une ferme avec des chevaux et qui ont toujours eu envie d’être des cavalières de la steppe. Une réalisation de petites madames qui avaient besoin de sortir de la routine (et de la ville) le temps d’une folle escapade.

Oui, mais pourquoi la Mongolie ? Parce que pas l’Asie du Sud-Est et ses millions de touristes.Parce que pas la destination du jour. Parce que le Plateau c’est beau, mais ça manque de grands espaces pour s’entendre penser tout haut. Alors la Mongolie. Et à cheval.

En mode nomade, nous avons donc rejoint une petite troupe éphémère. Cinq autres voyageuses (pour un total de 7 filles!), un guide nommé Enebish, deux éleveurs de chevaux (le père et le fils) pour prendre soin des montures, un cuisiner aux ressources inépuisables et deux chauffeurs qui nous rejoignaient le soir venu avec l’équipement et les bagages. Une meute d’individus aux parcours et personnalités multiples, rassemblés le temps d’une expérience unique, unis par leur amour des grands espaces et des folles chevauchées.

 

Avec ma monture, au lever du campement. Nous sommes prêtes à parcourir des dizaines de kilomètres.

 

Voyager à cheval, c’est avancer au rythme des pas de celui qui nous porte. C’est donner le temps au temps.
C’est se donner le luxe de penser, de bien regarder le paysage. De discuter, aussi. Parce qu’on a le temps de parler, pendant une journée à cheval. Ce qui fait qu’on découvre la personne dont la monture avance au même rythme que la nôtre. Le soir, on se couche avec le soleil. Épuisés, mais les yeux remplis de paysages sauvages et épurés. Le cœur émerveillé par ces petits moments tout simples mais bouleversants. Comme cette fois où on a pique-niqué sur le bord d’une rivière au milieu d’un troupeau de vaches. Qu’on s’est réveillés un matin dans un brouillard et que les chevaux et les hommes n’étaient que des ombres parmi les loups. Qu’on on a réussi à charger notre téléphone sur une borne électrique louée à l’heure dans un genre de dépanneur/yourte perdu dans un paysage aride. Qu’on a goûté goûter au fameux aïrag (du lait de jument fermenté) et que c’était étonnamment… bon ! On sourit aussi en se remémorant cet instant où il s’est mis à grêler soudainement et qu’on est tous partis au galop se réfugier dans une cabane à foin qui se trouvait heureusement sur notre chemin et que, pendant une heure, on a attendu que l’orage cesse en prenant des photos loufoques, entassés dans un espace restreint et franchement pas étanche. Il y a aussi la fois où on a fait un feu de camp et joué au Uno avec une gang de gars qui ne parlaient ni français ni anglais, juste le mongol. Tricher, c’est assez universel. Le gros fun noir aussi.

 

Notre guide, Enebish, avec Baghi, le fils de l’éleveur de chevaux.

 

Bivouac dans des yourtes près des chutes de l’Orkhon.

 

Notre parcours a débuté à Oulan-Bator. Sans doute la ville la plus laide du monde.
Mais la capitale de la Mongolie est aussi un lieu fascinant en raison de son bagage historique éclectique, régi par les conquêtes du passé. Entre l’empire de Genghis Khan, la domination des Mandchous, le régime communiste et l’implantation de la démocratie, tout ça pèse lourd dans la balance. L’architecture de la ville est d’ailleurs un tableau vivant de ce passé tumultueux et passionné : bunkers soviétiques, grandes places gardées par d’immenses statues équestres, gratte-ciels modernes et yourtes à perte de vue. Une ville qu’on sent en constante mutation, partagée entre son passé et son futur. Dans cet esprit, une visite s’impose au marché noir Khar Zakh, où la pacotille côtoie en plein air les antiquités et les trouvailles traditionnelles. Ça nous a permis de mettre la main sur des bas de laine de yak, un must pour nos hivers canadiens.

 

Le marché noir d’Oulan-Bator.

 

Le monastère Erdenezuu, où les moines se relaient nuit et jour pour prier.

 

Et puis, on a pris la route de la vallée de l’Arkhangaï
Pendant neuf jours, nous avons visité Karakorum (l’ancienne capitale de l’empire mongol et le seul temple tibétain qui a survécu aux rafles de l’envahisseur chinois), traversé la vallée de l’Orkhon et le Parc naturel des huit lacs, mis un pied ou deux dans le désert de Gobi et grimpé jusqu’au monastère Tovkhni, niché au sommet d’une montagne, pour boire un thé au lait avec le seul moine qui y habite en solitaire. On a croisé des chameaux, des loups, des troupeaux de moutons et de chevaux à ne plus pouvoir les compter. Des familles nomades nous ont accueillis le temps d’une nuit ou d’un thé au lait. Et on a découvert des panoramas infinis où l’horizon ne s’éteint jamais, des sources d’eau chaude, des cascades magnifiques, un pays immense et accueillant.

Pour se lancer dans un tel parcours équestre, pas besoin d’être un cavalier expérimenté: en famille, entre amis, en couple ou en solo, chaque personne trouve sa monture et suit le groupe à son rythme.

 

Sur la route de l’Arkhangaï, avec des yaks qui transportent notre matériel.

 

On retrouve ces structures partout partout dans la steppe. Il faut en faire le tour trois fois dans le sens des aiguilles d’une montre, puis faire un vœu et déposer des offrandes.

 

Est-ce que c’était parfait ? Ben non.
C’est ça, un voyage. À cheval, tu vas avoir mal partout. Dans une tente ? Tu gèles des fois. Le beurre de yak ? Yark. Enclavée entre la Chine et la Russie (qui les ont tous deux envahie en laissant leurs traces), la Mongolie un des pays les plus pollués au monde qui doit faire face à de nombreux défis, comme une économie précaire, un exode rural constant et un fort problème d’alcoolisme. Mais au-delà de ces enjeux, il n’en demeure pas moins qu’il subsiste un esprit de résistance nomade, de liberté et de partage du territoire qui fait plaisir à voir.

On se laisse séduire par les sourires réellement accueillants des gens que l’on croise. Et par le ciel qui projette son ombre sur une terre à perte de vue. On tombe en amour. Tout simplement.

 

On a le temps de se parler quand nos montures avancent au même rythme.

 

Souvenir d’un matin surréel dans la brume, dans le parc naturel Naiman Nuur.

 

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Pour visiter la Mongolie entre les LIGNES
On dévore l’excellente série policière Yeruldegger d’Ian Manook – du nom du commissaire de police Yeruldelgger Khaltar Guichyguinnkhen, au passé trouble, au nom imprononçable et au caractère inoubliable. Au fil de ses enquêtes, on découvre le peuple attachant et les paysages éblouissants d’un pays où s’entrechoquent tradition et modernité.

 

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