Profession: créatrice de bijoux, avec Isabelle Trahan

La femme derrière la collection de bijoux Si Simple ressemble à ses créations: discrète, élégante, tout en finesse. Comme ses bracelets et colliers, elle a aussi un côté métal (léger), qui fait d’elle une entrepreneure déterminée à tracer sa voie. Tout simplement.
Propos recueillis par mj desmarais PHOTOS SI SIMPLE

Tu as travaillé dans le milieu de la mode, où le rythme est trépidant et la compétition, féroce. Qu’est-ce qui t’a amenée à changer de carrière et à devenir entrepreneure?
J’ai toujours adoré ce milieu, ça me passionnait, mais mon cœur s’est brisé lorsque j’ai appris que l’entreprise pour laquelle je travaillais à l’époque, Jacob, allait se placer sous la protection de la Loi sur la faillite. Au bureau, l’annonce de cette nouvelle a créé un effet de choc. En deux ans, j’ai vécu trois abolitions de postes et ça m’a découragée au point où j’ai commencé à me sentir malheureuse. J’ai finalement accepté le chômage.
Cette année-là, j’ai fait plusieurs remises en question dans différentes sphères de ma vie. J’ai passé beaucoup de temps à réfléchir, je me suis ennuyée, je ne savais pas du tout ce que j’allais faire. J’avais le sentiment d’avoir tout exploré dans la grande et la petite entreprise. Pendant que j’étais en chômage, j’ai commencé à faire du bénévolat. Et pendant près d’une année, j’ai entrepris de faire plein de choses qui m’inspiraient, j’ai appris à suivre mon cœur, j’ai fait beaucoup de yoga et j’ai commencé à pratiquer la méditation. C’était la première fois que je me demandais: «Mais qu’est-ce que je vais faire?» Et puis, un jour, je me suis mise à créer des bijoux pour m’amuser, pour me désennuyer. Financièrement, j’étais pauvre, mais dans mon cœur, j’étais riche! Un soir, peu après avoir refusé quelques offres d’emploi, je me suis soudainement dit que j’allais commercialiser mon passe-temps. C’est à ce moment que les portes ont commencé à s’ouvrir. En anglais, on utilise le terme serendipity pour désigner la chance, les heureux hasards: tout semblait s’aligner. Mon seul défi, c’était d’avoir de la patience et de trouver des solutions pour y arriver. C’est ce que j’ai fait.

Comment a réagi ton entourage?
Assez bien. Mon père a d’abord été très surpris: je venais de refuser une offre d’emploi, je n’étais pas rémunérée depuis un moment et j’avais des obligations financières. Ma mère, de son côté, tentait de me rassurer en me disant que si ça ne marchait pas, je pouvais toujours retourner dans mon ancien domaine. Je pense que ça inquiétait un peu mon entourage, mais mon idée était faite: j’allais commercialiser mes bijoux et tenter d’en vivre.

As-tu rencontré des obstacles dans ton parcours?
Oh! Quelques-uns! Des amis qui m’ont quittée, des inquiétudes financières. Le moment qui m’a beaucoup affectée est survenu l’année dernière. Une entreprise concurrente s’est fait offrir le même contrat que moi par une agence de marketing. Elle a plagié mon produit, celui qu’on m’avait demandé de commercialiser, en le reprenant à son nom. Ça m’a réellement sciée en deux! Depuis, je protège mon travail.

La plus belle surprise?
J’attendais une de mes bonnes amies dans un café quand j’ai reçu un coup de fil du SAJE* annonçant que mon projet d’affaires, présenté la veille, avait été sélectionné. Quand mon amie est arrivée, elle a tout de suite su que quelque chose venait de se passer en voyant que j’avais les larmes aux yeux et le sourire fendu jusqu’aux oreilles. J’étais vraiment fière et je savais que ma patience et ma confiance allaient enfin porter fruit. Lorsque mon projet a été accepté pour la bourse STA (soutien aux travailleurs autonomes), ç’a été un moment important pour moi. Je pouvais me lancer pour vrai.

Un conseil que tu donnerais à quelqu’un qui démarre son entreprise?
Écoute ton cœur, apprends à connaître tes forces et tes faiblesses, entoure-toi des bonnes personnes et n’aie pas peur des défis – j’en ai eu plusieurs finalement !

Travailles-tu seule?
Non, plus maintenant. Je suis bien entourée, nous sommes de plus en plus nombreux à travailler ensemble, nous formons une grande famille. Tout le monde a sa place et tout le monde compte dans l’équipe, les travailleurs autonomes que j’embauche, comme les employés très près de moi. C’est important parce que je veux grandir en créant une belle entreprise.

 Quelle est ta philosophie derrière ta ligne de bijoux?
Inspirer les femmes à être authentiques. Se laisser mener par son cœur et apprendre à vivre de façon douce et harmonieuse aussi souvent que possible.

Où trouves-tu tes matériaux?
Ça, c’est un secret que j’aime bien garder! Le milieu est très compétitif…

Le nom, Si Simple, tu l’as trouvé comment?
J’ai toujours adoré le charme de la simplicité. Lorsque tu te connais bien et que tu apprends à t’aimer, tu réalises que la beauté se retrouve dans toutes les petites choses simples de la vie. En y regardant de près, tu découvres aussi que la chose la plus simple est en fait remplie d’une infinité de petits détails. Aussi, je tenais au mot simple parce qu’à chaque fois que j’avais un coup de cœur pour quelque chose, je disais: «C’est tellement beau! C’est si simple! »

À quoi ressemble ta cliente type?
Je crois qu’elle me ressemble par moments, qu’elle est touchée par la beauté, qu’elle a un grand cœur et qu’elle n’a pas d’âge!

Quelle est ta création préférée?
Je porte tout le temps mon bracelet Silver (petits tubes en argent véritable montés sur un fil noir). Je l’harmonise avec mon bracelet Cate (chaînette or ou argent), et le bracelet Marilou (anneau délicat monté sur un fil). Ils ont tous une histoire et je les aime parce qu’ils sont intemporels, délicats et simples! Je les refais chaque saison dans de nouvelles couleurs pour renouveler ma collection.

Mélanger les métaux: oui ou non?
OUI! Toujours! Il n’y a pas de règle. Avec les accessoires, on se réinvente en choisissant ce qui nous représente et ce qui nous fait du bien.